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En direct de Washington par Jean-Christo En direct de Washington par Jean-Christophe Debar

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Prendre un peu de recul, se dégager de l’actualité immédiate pleine de bruit et de fureur. C’est ce à quoi invitent les milliers de données sur la productivité agricole, couvant près d’un demi-siècle, publiées début octobre par le département américain de l’Agriculture (USDA). Nous nous sommes appuyés sur ces données pour répondre à une question simple : pendant cette période, comment a évolué, aux États-Unis, le revenu par actif agricole ? En dollars constants, c’est-à-dire déduction faite de l’inflation, la valeur de la production agricole – cultures et élevage – par hectare – prairies comprises – a plus que doublé entre les périodes 1961-1965 et 2012-2016. Cette efficacité accrue, due au progrès technique et à l’expansion de l’irrigation, a permis de réduire fortement le prix réel des aliments. Comme la surface disponible par actif agricole a, elle aussi, pratiquement doublé pendant ce laps de temps, la valeur de la production par actif agricole a été multipliée par 4,6.

Certes, mais la production n’est pas le revenu. Selon une autre série statistique de l’USDA, le rapport entre la valeur de la production agricole et le revenu des agriculteurs est tombé, entre les deux périodes considérées, de 30,8 % à 23,4 %. Autrement dit, le montant des charges – consommations intermédiaires, amortissements, rémunération des salariés… – a progressé, globalement, plus rapidement que la production. Si l’on applique ces ratios aux données précédentes, on en déduit que depuis le début des années 1960, le revenu par actif agricole a été multiplié, en termes réels, non par 4,6, mais par 3,5, ce qui reste une belle performance.

Il y a cependant deux ombres au tableau.

D’abord, cette performance a été obtenue au prix d’une division par deux du nombre de personnes travaillant dans l’agriculture. L’exode rural a favorisé la mécanisation des exploitations et a fourni la main-d’œuvre nécessaire à l’industrie et aux services, mais il a également engendré de grandes inégalités territoriales.

D’autre part, la hausse du produit brut par hectare a été obtenue par l’utilisation massive d’intrants chimiques, critiqués aujourd’hui pour leurs impacts sanitaires et environnementaux. Si l’on veut atteindre les objectifs de développement durable fixés par l’Organisation des Nations unies, ne faut-il pas emprunter une autre trajectoire de croissance ? Gageons que le prochain demi-siècle ne ressemblera pas à celui qui vient de s’écouler.

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